Interview de Karol Kozlowski, conférencier invité à l'ICM 2022
Interview de Karol Kozlowski, chargé de recherche CNRS affecté au Laboratoire de physique de l'ENS Lyon (UMR5672, CNRS & École normale supérieure de Lyon), conférencier invité à l'ICM2022 dans la section 11, Physique mathématique.
Quel est votre domaine de recherche ?
Mon domaine de recherche relève de la physique mathématique. C’est une branche des mathématiques visant à établir, de manière rigoureuse, les résultats et conjectures issus de problèmes physiques. En ce qui me concerne, je m’intéresse plus spécifiquement à une sous branche de la physique mathématique que sont les modèles intégrables quantiques. C'est une classe particulière de modèles issus de la physique quantique unidimensionnelle ou encore de la physique statistique bidimensionnelle qui peuvent être résolus explicitement. Cela signifie qu’un bon nombre d'observables d'intérêt physique peuvent y être calculés sous forme close grâce à l'utilisation de structures algébriques ingénieuses. Ces modèles offrent alors une possibilité inouïe d'étudier tout un tas de phénomènes encore peu compris sur un plan de rigueur satisfaisant, les transitions de phases notamment et, surtout, le principe d’universalité. Je travaille sur ces questions dont la résolution mélange un riche arsenal de mathématiques. Je me spécialise sur les aspects d'analyse asymptotique de tout genre qui s'appliqueraient à ce type de questions.
Qu'est-ce qui vous a amené à faire des mathématiques ?
Lorsque j'ai entamé mes études, je fus tout d'abord fasciné par cette une manière simple de comprendre la réalité - ou du moins certaines de ses facettes - qu’offrait la physique par le biais d'une mathématisation de la réalité. Plus la théorie physique est fine ou complète et plus les concepts mathématiques nécessaires à la formuler et manipuler deviennent évolués. En élargissant mon bagage mathématique, je me suis alors rendu compte que ce qui me plaisait le plus était cette interface entre la physique et les mathématiques où l'on cherche à obtenir, de manière pleinement rigoureuse, des résultats qui s'appliqueraient à un problème de physique donné. En particulier, j’ai été émerveillé par la richesse des outils et concepts que l'on peut être amener à manipuler pour arriver à bout d’un problème.
Qu'est-ce qu'un résultat « profond » pour vous ? Une démonstration « élégante » ?
Je considère qu'un résultat est profond lorsqu'il chamboule la vision et les préconçus d'une discipline. Ainsi, ce serait non seulement un résultat qui aurait été attendu depuis longtemps ou aurait nécessité la mise en place d'une preuve ingénieuse ou particulièrement technique, mais aussi un qui n'était pas forcément attendu voire impensable dans la conception des choses qui le précédaient.
Je trouve que pour considérer qu'un résultat est profond, il faut que celui-ci ouvre les portes à une pléthore d'applications et permette d'aller bien au-delà de ce qui était possible avant l'arrivée de celui-ci.
L’élégance d'une démonstration, tout comme l'appréciation de tout ce qui est beau, dépend bien évidemment de la personne qui l'étudie. En particulier, le bagage mathématique - au sens du domaine où l'on se spécialise - va jouer un grand rôle dans l'appréciation de l'élégance.
Dans mon cas, je trouve qu'une démonstration est élégante lorsqu'elle souligne la synergie de l’arsenal mathématique utilisé. C'est à dire qu'elle enchevêtre plusieurs concepts a priori assez distants pour aboutir au résultat.
Contact
Karol Kozlowski est chargé de recherche au CNRS. Il est membre du Laboratoire de physique de l'ENS Lyon (UMR5672, CNRS & École normale supérieure de Lyon).
Orateurs et oratrices à l'ICM 2022
Liste des collègues orateurs et oratrices de l’ICM 2022, qui se tiendra du 6 au 14 juillet en ligne.