Interview de Léo Bigorgne, chargé de recherche au CNRS
Interview de Léo Bigorgne, recruté chargé de recherche au CNRS en 2021, affecté à l'Institut de mathématiques de Rennes (IRMAR - UMR6625 - CNRS/ENS Rennes/INSA Rennes/Université Rennes 1/Université Rennes 2).
Quel est ton sujet de recherche ?
Je m'intéresse aux solutions d'équations aux dérivées partielles modélisant l'intéraction entre un grand nombre de particules et un champ, électromagnétique ou gravitationnel. En particulier, j'étudie le comportement en temps long de ces solutions en exploitant les propriétés géométriques des équations. Ces systèmes sont notamment utilisés en théorie des plasmas ou en relativité générale.
Qu’as-tu fait avant d’entrer au CNRS ?
J'ai effectué toute ma scolarité en Bretagne avant de migrer durant ma thèse au Laboratoire Mathématiques d'Orsay, en région parisienne. Enfin, j'ai passé deux ans en tant que postdoctorant à l'Université de Cambridge.
Qu’est-ce qui t’a amené à faire des mathématiques ?
J'ai assez vite été intéressé par l'astrophysique et la relativité générale et, à la base, je souhaitais en fait devenir physicien. Cela dit, je me souviens que je me posais régulièrement des questions basiques sur "l'infini" lorsque j'étais au CP. Ainsi, lorsque bien plus tard, mon professeur de terminale avait écrit au tableau, avec des quantificateurs, la définition d'une limite en mathématique, j'avais eu comme un déclic. Cela formalisait et répondait en quelque sorte aux questions que je m'étais posées et je me suis mis à voir les maths, non plus comme un outil, mais comme une science intéressante, au même titre que la physique. Ensuite, en classe prépa, j'avais bien plus de mal à comprendre les cours de physique que les cours de maths. J'avais la sensation que ce n'était pas assez rigoureux, j'avais du mal à être entièrement convaincu par les démonstrations, mais surtout, j'avais le sentiment de manquer cruellement d'intuition, de ne pas être assez doué pour faire de la physique. Je me suis donc définitivement tourné vers les maths à ce moment-là et j'ai été ravi de découvrir quelques années plus tard que l'on pouvait également travailler sur des problèmes de relativité générale tout en étant mathématicien !
Pourrais-tu nous parler de mathématiciens ou de mathématiciennes, historiques ou contemporains, qui t’ont marqué, influencé, ou que tu admires tout particulièrement ?
En premier lieu, c'est naturellement Jacques Smulevici, mon directeur de thèse, qui me vient à l'esprit. Il a bien évidemment joué un rôle important vis-à-vis de la nature des problèmes que je regarde et certaines des idées qu'il a développées sont capitales dans la résolution de ces problèmes. De plus, je trouve qu'il a une très bonne compréhension des concepts mathématiques de notre domaine de recherche et qu'il en explique très bien les idées clés.
Ensuite, au vu des outils mathématiques que j'utilise et des problèmes que je regarde, je pense que les travaux de Demetrios Christodoulou avec Sergiu Klainerman ainsi que ceux de Mihalis Dafermos en collaboration avec Igor Rodnianski font partie de ceux qui m'ont le plus influencé. Ils ont significativement contribué à l'essor de l'étude mathématique des équations d'Einstein.
Enfin, je pense également à Joackim Bernier, avec qui j'ai effectué ma scolarité à l'ENS Rennes. Sa capacité à bien comprendre et illustrer les concepts mathématiques ainsi que sa volonté d'étudier des problèmes qui se raccrochent à quelque chose de concret (comme un phénomène physique) m'ont positivement fait évoluer.
Concernant les résultats et scientifiques historiques, j'apprécie beaucoup l'expérience d’Ératosthène qui lui a permis de mesurer la circonférence la Terre. Citer Einstein va également de soi.
Qu’attends-tu du métier de mathématicien ?
De me permettre de comprendre le maximum d'idées possibles des théories scientifiques qui m'intéressent le plus. En particulier, les idées fondatrices de ces théories ainsi que celles développées récemment.
Pourquoi le CNRS ?
La liberté laissée par le CNRS à ses chercheurs est vraiment optimale. Tant sur le choix de nos sujets de recherche que sur le nombre d'heures que l'on veut dédier à l'enseignement ou bien encore sur la sélection de notre laboratoire d'accueil.
Contact
Léo Bigorgne est chargé de recherche au CNRS, membre de l'Institut de mathématiques de Rennes (IRMAR - UMR6625 - CNRS/ENS Rennes/INSA Rennes/Universités Rennes 1/Rennes 2).