Interview de Margaret Bilu, recrutée au CNRS en 2021
Interview de Margaret Bilu, chargée de recherche au CNRS affectée à l'Institut de mathématiques de Bordeaux (IMB - UMR5251 - CNRS/Bordeaux INP/Université de Bordeaux).
Quel est ton sujet de recherche ?
Mon domaine de recherche est à l'interface entre la théorie des nombres et la géométrie algébrique. La plupart de mes recherches concernent le groupe de Grothendieck des variétés, qui est défini comme le groupe abélien libre engendré par les classes d'isomorphisme de variétés algébriques, quotienté par ce qu'on appelle les relations de découpage. Dans ce groupe, on peut faire des calculs directement avec des variétés algébriques, et il permet de faire le lien entre certains résultats de théorie des nombres et des questions de nature plus géométrique. En particulier, on peut de cette manière appliquer des techniques inspirées de la théorie des nombres pour aborder des problèmes géométrie algébrique, comme l'étude d'espaces de modules de courbes sur certaines variétés.
Qu’as-tu fait avant d’entrer au CNRS ?
Après ma scolarité à l'ENS, j'ai fait une thèse à l'université Paris-Sud sous la direction d'Antoine Chambert-Loir. Ensuite j'ai passé trois années en post-doctorat à New York, au Courant Institute of Mathematical Sciences (New York University). Enfin, j'ai pu bénéficier d'une bourse Marie Curie pour travailler avec Tim Browning à l'IST Austria, près de Vienne, en Autriche.
Qu’est-ce qui t’a amenée à faire des mathématiques ?
Les mathématiques ont toujours un peu fait partie de ma vie car mon père est chercheur en mathématiques. Cela dit, jusqu'à l'âge de 15 ans les mathématiques ne m'intéressaient pas plus que cela, même si je ressentais comme un devoir d'y exceller. J'étais plutôt attirée par les langues (aussi bien vivantes qu'anciennes), et je voulais en apprendre autant que possible. C'est en première que j'ai eu un jour le déclic, en particulier grâce à ma professeure de mathématiques, qui a su mobiliser mon intérêt en me proposant des problèmes d'olympiades. C'est à partir de ce moment-là que j'ai décidé que je voulais faire de la recherche en mathématiques.
Pourrais-tu nous parler de mathématiciens ou de mathématiciennes, historiques ou contemporains, qui t’ont marquée, influencée, ou que tu admires tout particulièrement ?
J'ai toujours eu une grande admiration pour les mathématiciens des siècles passés, comme Gauss, Euler ou Riemann, qui ont fait des découvertes fondamentales qui influencent encore maintenant les recherches en théorie des nombres, et ce sans la panoplie de moyens de communication et d'information dont nous disposons actuellement. Pour ce qui est des mathématiciens contemporains, sans forcément donner de noms, j'ai rencontré lors de mon parcours un certain nombre de mathématiciens véritablement passionnés, capables de s'investir à fond dans des problèmes à toute heure, et avec un pouvoir de concentration hors du commun. Un certain nombre d'autres mathématiciens m'ont impressionnée par l'ampleur de leurs connaissances et la facilité avec laquelle ils pouvaient expliquer un théorème, une preuve, une notion, au détour d'une conversation.
Qu’attends-tu du métier de mathématicien ?
J'aimerais prouver des résultats dont je suis fière, et que j'aurai du plaisir à présenter aux autres.
Pourquoi le CNRS ?
Le CNRS est un organisme qui donne une grande liberté dans la manière de gérer son temps de travail, ainsi qu'une certaine flexibilité géographique, deux facteurs qui sont importants pour moi car ils facilitent l'organisation de la vie de famille.
Contact
Margaret Bilu est chargée de recherche au CNRS. Elle est membre de l'Institut de mathématiques de Bordeaux (IMB - UMR5251 - CNRS/Bordeaux INP/Université de Bordeaux).